Raymond BOUCHER

Avait : 14 ans et demi le 16 juillet 1943

Habitait : Rue de la Victoire à Sochaux

avec : ses parents

Mes parents se sont levés lorsque nous avons entendu les avions qui tournaient. De là où nous étions, nous n'avons pas vu les fusées. Nous pensions à des vagues d'avions qui allaient sur l'Italie et l'Allemagne. C'est mon père qui a eu la présence d'esprit de nous faire quitter la maison préventivement : " ce sont des avions qui tournent autour de Sochaux, a t-il dit, on s'en va. ". Dans la rue personne ne croyait à ce bombardement. Ca a été un choc que nous avons eu tous à encaisser. Alors nous avons tout quitté nos maisons en pleine nuit, moi-même j'étais encore en pyjama. Nous nous sommes dirigés en direction de la Brasserie, pensant ainsi s'éloigner des usines Peugeot.. On s'est retrouvé en plein sous les bombes dans les prés près de la ferme Pugin. La progression était de plus en plus difficile, chaque fois qu'une bombe tombait, on se couchait par terre puis on se relevait. On a reculé. Et là, on s'est séparé maman et moi on a retrouvé refuge entre deux maisons et on est resté là dans notre " abri " provisoire. On a perdu mon papa de vue, lui est parti en arrière de nous.

Tout s'est terminé vers 2 heures du matin, on est rentré à la maison maman et moi. Y avait un gros trou, plus rien. Alors nous sommes entrés dans ce qui restait de notre maison et on a attendu ... on a attendu le retour de papa. Les jours se sont succédés et on a continué à attendre dans l'angoisse, sans savoir. On allait chez la mère de Robert "Bobby" Coulon, le gardien de but de Sochaux, qui tenait un café dans notre rue où elle tâchait de nous réconforter. Moi, j'ai fait tous les hôpitaux pour essayer de voir si mon papa était là, en vain. Et puis, les jours ont encore passé ainsi que les mois et au mois de janvier on nous a appris que l'on a retrouvé mon papa mais malheureusement, mort. Il avait sauté un muret pour se mettre à l'abri et s'est retrouvé enseveli sous les décombres. Son corps est resté six mois là. C'est mon oncle qui tenait le café Poublanc en face de chez Haas qui est allé reconnaitre mon père à la morgue.