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Témoignage(s) de GOUDEY Michel

Le bombardement de Sochaux

C'était une belle journée.

On était allé se distraire au cirque Gruss installé sur le Champ de Foire et nous sommes revenus vers 22 heures, juste pour le couvre-feu. Il faisait chaud, on avait laissé les fenêtres ouvertes. Nous avons été réveillé par le passage des avions. C'était plus bruyant que d'habitude.

Des passages de bombardiers, il y en avait souvent dans le secteur mais là, le bruit était plus fort.

Il fallait que j'aille à Sochaux pour voir comment il allait mais mon oncle et ma tante m'en ont empêché mais j'ai insisté et vers 5 heures du matin, je suis parti à Sochaux à vélo. En cours de route, j'ai laissé mon vélo chez un ami et je me suis approché de Sochaux à pied. Le Cercle Hôtel était en flammes, il y avait les pompiers avec leurs véhicules, des groupes de soldats allemands. Le Café Beck était coupé en deux et là, je me suis dit : "le Beckot est foutu". Il y avait plus personne et quand j'ai demandé aux gens où étaient mon copain et sa famille, ils m'ont dit qu'ils avaient pu partir, ce qui m'a rassuré un peu.

A partir de cet instant, je me suis retrouvé avec les pompiers de Montbéliard que je connaissais, étant pompier moi-même, et j'ai donné un coup de main. On a tiré des tuyaux, extirpé des blessés. Les conduites d'eau giclaient et les rails du tramway étaient soulevés.

La pharmacie JOLIDON était en flammes. J'ai vu des cadavres, mais dans l'action, je n'ai pas eu le temps de m'attendrir, il fallait faire quelque chose. Le lendemain, je faisais partie des équipes formées par Peugeot pour déménager les sinistrés. Nous avions eu des DMA et les opérations ont duré huit jours. Les familles de Sochaux ont été envoyés vers la Haute-Saône et le Haut-Doubs en attendant la reconstruction de leur logement.

Je travaillais à déménager la maison de Monsieur PETITJEAN (l'ex Restaurant Luc Piguet); cela faisait cinq jours que nous déménagions cette maison lorsque notre responsable, un gars qui jouait au basket sur Montbéliard et dont je me rappelle plus du nom, nous dit : "les gars, je vais vous demander quelque chose de grave." "Quoi ?", répondons-nous alors. "Il y a une maison où il y a une bombe qui n'a pas explosé, acceptez-vous de la déménager celle-là ?" et là, mon camarade Michel PICHON déclare : "les Anglais ne sont pas des salauds, ils ont pas lancé des bombes à retardement, on y va !".

Effectivement, il nous a fallu trois à quatre camions pour déménager cette maison et à la fin, nous avons débouché une bouteille de vin et nous l'avons bu ensemble, assis sur la fameuse bombe qui n'avait pas explosé et qui était couchée à plat, à moitié enfoncée dans le sol de la cave.